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Soigner la dépression par le football : une prescription sociale innovante

Edité par : Safa Kaouther BOUARISSA | Journaliste
10 septembre 2025

Et si le remède à la dépression légère ne se trouvait pas dans une boîte de médicaments, mais dans les gradins d’un stade ? Le Dr Simon Opher, médecin généraliste, tente une nouvelle approche thérapeutique : prescrire des billets pour des matchs de football à ses patients souffrant de troubles dépressifs légers à modérés.

Dans un contexte où la prescription d’antidépresseurs est en forte hausse dans le monde — souvent pour des cas de dépression non sévère — certains médecins s’interrogent sur leur pertinence. Le Dr Opher fait partie de ces praticiens convaincus que la réponse n’est pas toujours pharmacologique.

« Ce n’est pas d’un médicament dont mes patients ont besoin, mais de liens sociaux », explique-t-il. Il travaille avec le club Forest Green Rovers (cinquième division anglaise), qui offre des billets aux patients concernés.

Ce type d’initiative s’inscrit dans une approche appelée « social prescribing » (prescription sociale), de plus en plus encouragée au Royaume-Uni, en Scandinavie ou au Canada.

L’idée : prescrire des activités culturelles, sportives ou communautaires plutôt que des médicaments, lorsque les causes de la souffrance psychique sont davantage sociales que biologiques.

La dépression légère ou modérée est souvent liée à des facteurs environnementaux : isolement, stress chronique, sentiment d’inutilité, perte de lien ou d’activités gratifiantes. Dans ces cas, la désactivation des circuits de récompense dans le cerveau entraîne une baisse de la dopamine, de la sérotonine et de l’endorphine, provoquant apathie, tristesse et fatigue.

Or, participer à un événement collectif, comme un match de football, stimule plusieurs systèmes cérébraux : l’empathie sociale, l’enthousiasme, le sentiment d’appartenance, voire l’émerveillement partagé. Le bruit du stade, les cris, la tension, les applaudissements relancent la production de neuromédiateurs impliqués dans le plaisir et l’énergie mentale.

D’un point de vue neuroscientifique, l’exposition à une activité sportive collective peut stimuler la neuroplasticité, c’est-à-dire la capacité du cerveau à se réorganiser et à créer de nouvelles connexions. L’anticipation d’un événement plaisant augmente la dopamine, un neurotransmetteur clé de la motivation, souvent perturbé dans les troubles dépressifs.

De plus, le simple fait de se projeter dans une sortie, de préparer sa venue au stade, de rencontrer d’autres supporters, active des zones du cerveau impliquées dans la planification, l’interaction sociale et la mémoire émotionnelle. Cela agit comme un levier comportemental positif, comparable à certaines techniques de thérapie comportementale et cognitive (TCC).

Simon Opher souligne que l’un des grands facteurs de mal-être est l’isolement. « Les pubs ne sont plus ce qu’ils étaient, les familles sont éclatées, les interactions sociales diminuent. Or, c’est délétère pour le cerveau », explique-t-il.

L’isolement chronique est aujourd’hui reconnu comme un facteur de risque majeur pour la santé mentale et physique, comparable à l’obésité ou au tabagisme. Il est associé à un état inflammatoire de bas grade, à une baisse de l’immunité et à un risque accru de démence ou de maladies cardiovasculaires.

Dale Vince, président du club Forest Green Rovers, soutient l’initiative : « Il est facile de sombrer lorsqu’on perd tout contact avec les autres. Le football peut être un antidote social. Nous avons un rôle à jouer. » Son club, engagé dans des projets communautaires et environnementaux, voit dans cette collaboration une continuité de son implication sociétale.

Cette approche, qui replace la personne dans un environnement stimulant et collectif, marque une transition vers une médecine plus globale, plus humaine et moins centrée sur les traitements médicamenteux. Elle réaffirme l’importance des facteurs psycho-sociaux dans le traitement des troubles mentaux légers, en particulier chez les jeunes adultes et les personnes âgées.

Des études cliniques sont en cours pour évaluer l’impact à long terme de ce type de prescriptions sociales. Mais déjà, des premiers résultats suggèrent une réduction de l’anxiété, une amélioration de la qualité de vie et une baisse des consultations médicales répétées.

Mots clés : pharmacologie ; santé ; football ; humaine ; isolement ; dépression ; antidépresseur ;

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