Dans le cadre du programme de formation continue élaboré par la Direction de la Santé et de la Population (DSP) de la wilaya de Mascara, une conférence scientifique s’est tenue à l’Institut National de Formation Supérieure Paramédicale de Khezzabia, sous le thème : ‘’Les cardiopathies congénitales chez l’enfant et leur prévention’’. La session a été conduite par le Professeur Redha Touati, cardiopédiatre de renom et enseignant-chercheur au Centre Hospitalo-Universitaire de Blida.
Une pathologie fréquente et multidimensionnelle
Les cardiopathies congénitales (CC) représentent la malformation congénitale la plus fréquente dans le monde, avec une incidence moyenne estimée à 8 à 10 pour 1 000 naissances vivantes, selon l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS). En Algérie, bien que les données épidémiologiques soient encore parcellaires, les estimations convergent vers 3 500 à 4 500 nouveaux cas par an, dont un tiers nécessite une prise en charge chirurgicale précoce.
Le Professeur Touati a présenté une analyse intégrée des principales formes cliniques, allant des shunts simples (CIV, CIA, PCA) aux anomalies complexes (Tétralogie de Fallot, transposition des gros vaisseaux, hypoplasie du cœur gauche). Il a insisté sur l’importance du dépistage anténatal par échographie fœtale ciblée, entre 20 et 24 SA, ainsi que sur la mise en œuvre de protocoles de suivi post-natal systématique chez les nouveau-nés à risque.
Une intervention médicale éclairante sur les cardiopathies congénitales

Lors de la conférence, le professeur Touati a exposé en détail les principales causes des malformations congénitales cardiaques chez les enfants, en insistant sur les facteurs de risque d’ordre génétique, infectieux, métabolique ou environnemental. Il a notamment évoqué l’impact possible de certaines infections maternelles durant la grossesse (comme la rubéole), le diabète gestationnel mal contrôlé, l’exposition à certains médicaments tératogènes, ou encore des antécédents familiaux de malformations cardiaques.
Le conférencier a mis en lumière les principaux facteurs de risque : antécédents familiaux, diabète maternel, infections materno-fœtales (notamment rubéole et CMV), consommation de substances tératogènes, déficiences nutritionnelles (acide folique), ainsi que l’exposition à des pesticides ou perturbateurs endocriniens.
De la prévention primaire à la surveillance spécialisée
Le professeur Touati a ensuite mis en avant l’importance du dépistage précoce, qui peut être réalisé dès la période prénatale grâce à l’échographie fœtale cardiaque, généralement entre la 20e et la 24e semaine de grossesse. Cette technique permet de détecter certaines anomalies structurelles du cœur avant la naissance, facilitant ainsi une prise en charge spécialisée dès l’accouchement.
Après la naissance, le diagnostic repose sur des examens cliniques et paracliniques tels que l’auscultation, l’électrocardiogramme (ECG), l’échocardiographie transthoracique et parfois l’imagerie par résonance magnétique (IRM cardiaque). Des signes comme une cyanose, des difficultés respiratoires, une mauvaise prise de poids ou un souffle cardiaque doivent alerter rapidement.
Le chercheur a également présenté les options thérapeutiques disponibles, qui varient selon la gravité de la malformation. Il a distingué les traitements médicaux, consistant à stabiliser l’état de l’enfant (oxygénation, médicaments pour améliorer la fonction cardiaque), des interventions chirurgicales ou interventionnelles (comme les cathétérismes cardiaques), parfois réalisées dès les premières semaines de vie. Il a souligné les progrès remarquables de la chirurgie pédiatrique et des techniques mini-invasives, qui permettent aujourd’hui de corriger ou pallier efficacement de nombreuses malformations avec un taux de survie élevé.
Le Professeur Touati a évoqué les dernières recommandations de l’ESC (European Society of Cardiology) et de l’AHA (American Heart Association) sur la stratification des risques, les indications opératoires et les délais de correction, en insistant sur la nécessité d’une coordination interdisciplinaire entre obstétriciens, néonatologistes, cardiopédiatres, anesthésistes et chirurgiens cardiaques.
Enfin, le professseur Touati a insisté sur la nécessité d’un suivi régulier et pluridisciplinaire – associant pédiatres, cardiologues, chirurgiens et généticiens – pour assurer une prise en charge globale, améliorer la qualité de vie des enfants concernés et prévenir les complications à long terme.
Défis du système de santé locale et perspective
La discussion a permis de soulever plusieurs problématiques systémiques dans le contexte algérien :
- Le retard diagnostic en zone rurale, en raison du manque de formation en échocardiographie néonatale,
- Le déficit en centres de référence, notamment en chirurgie cardiaque pédiatrique,
- L’absence de registre national des malformations congénitales, pourtant essentiel pour orienter les politiques de santé publique.
Dr Ahmed Mouslim, représentant du directeur de la DSP, a salué cette initiative comme le début d’une dynamique régionale de renforcement des compétences médicales, axée sur les affections à haute morbidité infantile.
Il a également annoncé que cette session s’inscrit dans un programme de formations continues pluridisciplinaires qui se poursuivra en 2025 autour d’autres priorités nationales : maladies génétiques rares, néonatologie avancée, santé mentale infantile, nutrition périnatale, etc.
Échanges et débats cliniques
La rencontre s’est clôturée par une session de questions-réponses ouverte, abordant notamment :
- La pertinence du dépistage de masse par oxymétrie de pouls chez les nouveau-nés (recommandée par la HAS depuis 2020),
- Les protocoles d’orientation en première ligne pour les structures de santé dépourvues d’imagerie spécialisée,
- Les possibilités de télémédecine pour l’expertise échographique à distance, en lien avec les centres universitaires.
Le conférencier a répondu à de nombreuses questions soulevées par l’auditoire, notamment sur les modalités de dépistage précoce et les protocoles de suivi. Les échanges ont donné lieu à un débat scientifique riche, révélant les préoccupations du terrain et la nécessité d’unir les efforts autour de cette problématique de santé publique.
Le Pr Touati a souligné que l’amélioration du pronostic vital et fonctionnel des enfants porteurs de CC dépend de la détection précoce, d’un diagnostic précis, d’une intervention adaptée et d’un suivi rigoureux à long terme.
Mots clés : cardiaque ; enfant ; maladie ; santé ; Mascara ; DSP ;
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