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Algérie: Première greffe rénale par cœlioscopie, une percée chirurgicale au CHU Lamine Debaghine

Edité par : Safa Kaouther BOUARISSA | Journaliste
1 juillet 2025

Le Centre hospitalo-universitaire Lamine Debaghine de Bab El Oued (ex-Maillot), à Alger, a marqué un jalon historique en réalisant pour la première fois en Algérie une greffe rénale à partir d’un donneur vivant avec prélèvement par cœlioscopie. Cette intervention, effectuée par une équipe algérienne, représente un bond qualitatif pour la chirurgie nationale, jusque-là limitée aux techniques classiques plus invasives.

Menée avec succès, cette opération introduit une approche moderne dans le champ de la transplantation d’organes, grâce à l’utilisation d’une technique déjà largement adoptée dans les pays aux systèmes de santé avancés.

L’intervention a été réalisée par les professeurs Achour, Laribi et Saaoui, avec la participation du Dr Khelifa Aït Saïd, chirurgien urologue de renommée internationale, exerçant en France. Invité par la société Galientis,  Dr Aït Saïd a mis à profit son expertise en chirurgie mini-invasive et robotique pour accompagner la première application de cette technique dans un établissement hospitalier algérien.

Cette collaboration s’inscrit dans une stratégie plus large de transfert de compétences et de montée en technicité du personnel médical algérien.  Dr Aït Saïd a d’ores et déjà exprimé sa disponibilité à former d’autres chirurgiens sur le territoire national, dans l’objectif de généraliser l’usage de la cœlioscopie dans la greffe rénale.

Le recours à la cœlioscopie dans le cadre de la transplantation permet de remplacer la chirurgie par lombotomie, bien plus lourde. Elle offre de nombreux bénéfices médicaux, tant pour le donneur que pour le receveur :

  • Réduction significative de la douleur post-opératoire
  • Moindre risque de complications per- et post-opératoires
  • Cicatrisation plus rapide
  • Hospitalisation écourtée (24 à 48 heures en moyenne)
  • Reprise plus rapide des activités quotidiennes

Ces avantages techniques favorisent un meilleur vécu psychologique et physique pour les donneurs vivants, améliorant potentiellement leur acceptation du don, un facteur crucial dans un pays où le nombre de greffes demeure très limité.

Actuellement, l’Algérie compte près de 30 000 patients en insuffisance rénale chronique sous hémodialyse, pour environ 200 greffes rénales effectuées chaque année, toutes confondues. Ce déséquilibre met en évidence une insuffisance structurelle de l’offre de greffe d’organes.

Le développement de la cœlioscopie comme méthode standardisée pourrait faciliter le recours au don vivant, et réduire les coûts liés à l’hémodialyse, dont l’impact sur le budget de la santé publique est considérable. Le Dr Aït Saïd a souligné le potentiel de cette technique pour améliorer durablement l’efficience du système de santé.

Le rein a été prélevé sur une mère donneuse vivante, pour être greffé à son fils adolescent âgé de 14 ans, dans des conditions chirurgicales allégées. Cette opération revêt une dimension humaine forte, illustrant le rôle crucial de l’innovation médicale dans l’amélioration du parcours de soin, tout en respectant la dignité et le confort des patients.

Le professeur Farid Haddoum, chef de service de néphrologie au CHU Mustapha et témoin de l’intervention, a rappelé que la réussite d’une greffe dépend de la rigueur absolue des équipes, en particulier lorsqu’il s’agit de procédures inédites.

Le ministre de la Santé, Abdelhak Saihi, a salué cette réussite comme un tournant stratégique pour l’intégration des techniques chirurgicales avancées dans les établissements hospitaliers publics. Il a réaffirmé l’engagement des pouvoirs publics à accompagner et accélérer l’introduction de la cœlioscopie dans les différents CHU du pays.

Un plan de développement, incluant la formation des équipes, l’équipement des blocs opératoires et l’adoption de protocoles nationaux, est envisagé pour accompagner cette modernisation progressive de la greffe rénale.

Au-delà de l’innovation technique, cette avancée soulève la nécessité d’une mobilisation autour du don d’organes, notamment post-mortem, encore marginal en Algérie. Le Dr Aït Saïd a insisté sur la nécessité de sensibiliser la population, mais aussi de renforcer le cadre législatif et éthique, afin de favoriser une culture du don et élargir les sources de greffons.

La réussite de cette première greffe rénale par cœlioscopie constitue une avancée technique, humaine et institutionnelle majeure. Elle ouvre la voie à une refonte progressive de la stratégie nationale de transplantation, plus moderne, plus accessible et mieux adaptée aux besoins croissants des patients algériens atteints d’insuffisance rénale chronique.

Ce succès illustre la capacité du corps médical algérien à s’approprier des pratiques de pointe, à condition d’un appui structurel solide et d’une vision sanitaire ambitieuse. La cœlioscopie devient ainsi un outil stratégique pour réconcilier excellence médicale, humanité et rationalité économique.

Mots clés : santé ; CHU ; rénale ; cœlioscopie ; greffe ; chirurgie ; transplantation ; don ; organes ; rein ;