Une hausse brutale des cas d’intoxication au plomb

Le service de toxicologie du CHU de Bab El Oued (Alger) alerte sur une hausse inquiétante de cas de saturnisme aigu chez des nourrissons. Selon le communiqué, plusieurs familles ont administré par voie orale du Khôl, un produit traditionnel fortement chargé en plomb et utilisé, à tort, comme remède. Cette pratique expose les enfants à une intoxication grave et parfois mortelle.

Des cas dramatiques, parfois fatals

L’utilisation du khôl (aussi appelé khol, surma ou kajal) sur les nourrissons et les jeunes enfants est une pratique traditionnelle courante dans de nombreuses cultures, mais elle représente un danger réel et sérieux pour la santé de l’enfant.

Plusieurs enfants ont été admis en urgence, présentant des niveaux de plomb incompatibles avec une évolution normale :

• Nourrisson de 19 mois : plombémie 52,5 µg/L, hospitalisation prolongée.
• Nourrisson de 12 mois : plombémie 722,4 µg/L, complications sévères et engagement vital.
• Nourrisson de 10 mois : suspicion de saturnisme aigu non confirmée faute de dosage.
• Cas le plus grave : un enfant de 14 mois décédé, avec une plombémie mesurée à 102 µg/L.

Le Danger Principal : L’Intoxication au Plomb (Saturnisme)

Selon les toxicologues le khôl traditionnel brut (la roche noire) et sa poudre :

Composition : Le khôl traditionnel est souvent fabriqué à partir de galène, un minéral qui contient du sulfure de plomb.

Teneur en plomb : De nombreuses analyses ont montré que les poudres de khôl artisanal peuvent contenir jusqu’à 80 % de plomb.

Absorption : Le plomb passe dans le sang du bébé par la muqueuse de l’œil, ou lorsque l’enfant se frotte les yeux puis met ses doigts à la bouche.

Pour mémoire, l’OMS fixe le seuil d’alerte à 50 µg/L chez l’enfant. Les valeurs enregistrées dépassent largement ce niveau et témoignent d’une intoxication massive.

Pourquoi le plomb est-il si dangereux ?

Le plomb est un neurotoxique puissant. Même à faible dose, il est dangereux pour un cerveau en plein développement. Les conséquences peuvent inclure :

• Dommages neurologiques : Le plomb est un neurotoxique puissant. Le système nerveux des enfants est extrêmement vulnérable. Même de faibles quantités peuvent provoquer des dommages durables. Retards de développement intellectuel, problèmes de comportement, baisse du QI.

Les effets les plus graves incluent aussi :

• anémie sévère : Le plomb empêche la bonne fixation du fer.
• Atteintes rénales : Risque pour les reins.

Symptômes aigus : Dans les cas graves (forte exposition), cela peut causer des vomissements, des douleurs abdominales, de l’irritabilité et des convulsions.

• convulsions, coma,
• risque de décès.

Chez les survivants, les séquelles peuvent être irréversibles :

• retard psychomoteur,
• troubles du comportement,
• baisse du QI et déficit cognitif permanent,
• difficultés scolaires durables.

Autres Risques (Bactéries et Irritations)

Outre le plomb, le khôl artisanal présente d’autres risques :

• Infections oculaires : La poudre ou le bâtonnet applicateur (le mirwad en bois que l’on voit sur la photo) peuvent être contaminés par des bactéries, provoquant des conjonctivites ou des infections graves chez le nouveau-né.
• Abrasion de la cornée : Les particules de poudre mal broyées peuvent rayer l’œil fragile du bébé.

Aucune dose de plomb n’est considérée comme sûre pour les nourrissons.

Une pratique traditionnelle devenue une menace sanitaire

L’usage du Khôl par voie orale repose sur des croyances anciennes. Mais la composition actuelle de nombreux produits disponibles sur le marché est hautement toxique.

Ces pratiques exposent les enfants à un danger immédiat et compromettent leur développement futur.

Recommandations médicales urgentes

Les spécialistes du service de toxicologie du CHU de Bab El Oued appellent à une mobilisation rapide :

Pour les parents :

• Ne jamais donner de Khôl par voie orale ou en application sur les muqueuses.
• Vérifier l’absence de produits à base de plomb dans l’environnement de l’enfant.
• Consulter immédiatement en cas d’ingestion suspecte ou de symptômes inhabituels (vomissements, irritabilité, somnolence anormale).
• Demander une plombémie si une exposition est possible.

Pour les professionnels de santé :

• Identifier précocement les signes d’intoxication.
• Informer les familles sur les dangers des produits traditionnels non contrôlés.
• Signaler les cas aux autorités sanitaires.

Un message clair des toxicolgues : ces pratiques doivent cesser

L’utilisation du Khôl comme remède expose les enfants à un risque réel de mort. Chaque cas d’intoxication est un drame évitable. La protection des nourrissons dépend d’une prise de conscience collective.

Si vous avez déjà utilisé du khôl sur votre enfant, il est conseillé d’arrêter immédiatement et d’en parler à votre pédiatre, qui pourra vérifier le taux de plomb dans le sang (plombémie) si nécessaire.

Arrêtons d’empoisonner les enfants. Agissons avant qu’un autre drame ne survienne.

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