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À Tipaza, le cœur bat au rythme de l’innovation

Edité par : Dr Mohamed Tahar Aissani | Docteur en médecine
18 juillet 2025

Une première médicale pour mieux traiter les troubles du rythme cardiaque

À Tipaza, il n’y a pas que les vagues de la Méditerranée qui résonnent. Désormais, un autre battement fait écho entre les murs de l’hôpital public : celui de l’innovation médicale. Dans un pays où les maladies cardiovasculaires continuent d’ôter la vie à des milliers d’Algériens chaque année, une lueur d’espoir vient d’émerger. Pour la première fois dans un établissement public, une technique de stimulation cardiaque dite « physiologique » a été réalisée avec succès. Ce n’est pas un simple exploit technique : c’est un tournant, presque une promesse que l’Algérie médicale peut, elle aussi, battre au rythme du monde.

Il faut imaginer le cœur non pas comme une simple pompe, mais comme un orchestre minutieux, dirigé par un chef invisible : l’électricité. Lorsqu’un dérèglement survient — une lenteur anormale, un signal désordonné — l’organisme entier s’essouffle. On parle alors de bradycardie, un mal silencieux mais redoutable. Pour y remédier, les médecins implantent un pacemaker, ce petit boîtier capable d’émettre des impulsions électriques pour relancer la cadence.

Mais comme tout chef d’orchestre improvisé, le pacemaker classique peut parfois jouer une partition approximative. Si le cœur bat, il ne bat pas toujours juste.

C’est ici que la prouesse technique de l’hôpital de Tipaza prend tout son sens. Sous la direction du Dr Yazid Ouddia, chef du service de cardiologie, une nouvelle voie a été empruntée : celle du faisceau de His. Cette structure, peu connue du grand public, est en réalité le circuit électrique central du cœur. En stimulant directement cette voie — plutôt que de contourner le système naturel comme le font les pacemakers traditionnels — on obtient une régulation plus précise, plus fidèle à la physiologie humaine.

La différence ? Elle est subtile mais cruciale. C’est la nuance entre marcher et danser, entre survivre et vivre. Les battements du cœur retrouvent leur harmonie naturelle, sans forcer, sans fatigue, sans faux rythme.

Bien sûr, l’innovation a un prix : 500 000 dinars par implant, soit cinq fois le coût d’un pacemaker standard. Pour un hôpital public, c’est un choix audacieux. Mais à long terme, ce choix pourrait s’avérer payant. Moins de complications, moins d’hospitalisations, une meilleure qualité de vie… L’équation budgétaire mérite d’être regardée avec une vision élargie, qui intègre aussi le bien-être humain.

Le Dr Ouddia reste mesuré mais confiant : sur les 200 interventions pratiquées chaque année à Tipaza, 25 patients bénéficieront dès cette année de cette technologie. Une goutte d’eau, peut-être, mais une goutte qui annonce la pluie.

Le ministère de la Santé a salué cette avancée comme une étape stratégique dans la modernisation des soins en Algérie. Car au-delà de l’opération réussie, c’est un symbole qui se dessine : celui d’un système de santé capable d’innover, de s’adapter, et de tendre vers l’excellence.

D’autres hôpitaux sont déjà sur la ligne de départ. Si les résultats sont concluants — et tout porte à le croire — une généralisation progressive pourrait être envisagée, à condition d’un accompagnement budgétaire cohérent, mais aussi d’une formation technique adaptée.

Ce que l’hôpital de Tipaza a réussi à faire, c’est bien plus qu’un exploit chirurgical. C’est un signal fort envoyé aux malades, aux soignants, aux décideurs : l’innovation n’est pas un luxe réservé aux pays riches. Elle est une nécessité. Une urgence. Et parfois, une simple impulsion bien placée suffit à relancer tout un système.

Dans ce pays où les batailles sanitaires sont nombreuses, où les cœurs s’essoufflent autant que les espoirs, une chose est désormais sûre : à Tipaza, on a prouvé que le cœur de l’Algérie pouvait battre autrement. Plus justement. Plus humainement.

Mots-clés : Pacemaker ; Faisceau de His ; Stimulation ; Bradycardie Insuffisance ; cardiaque ;

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