Le tabagisme reste un enjeu majeur de santé publique en Algérie, où la prévalence du tabac est élevée, en particulier chez les hommes. Une nouvelle étude, inspirée d’une vaste enquête coréenne, pourrait redéfinir notre compréhension des délais nécessaires pour que le risque cardiovasculaire (CV) des anciens fumeurs rejoigne celui des non-fumeurs, particulièrement dans des contextes similaires à celui de l’Algérie.
Le poids du tabagisme cumulatif sur la santé cardiovasculaire
Les maladies cardiovasculaires représentent une des principales causes de mortalité en Algérie. Les dommages causés par le tabac sur les cellules cardiovasculaires, même à faible consommation, s’accumulent et persistent longtemps après l’arrêt du tabac. Ces dommages, mesurés par l’exposition cumulée (en paquets-années), influencent directement le temps nécessaire pour observer une réduction significative du risque CV chez les ex-fumeurs.
Que nous apprennent les données internationales ?
Des études européennes et américaines estiment généralement qu’un ancien fumeur retrouve un risque CV comparable à celui d’un non-fumeur entre 10 et 15 ans après le sevrage. Cependant, une nouvelle recherche menée en Corée sur plus de 5 millions de participants montre que ce délai pourrait être beaucoup plus long, notamment pour les “gros” fumeurs ayant accumulé une exposition supérieure à 8 paquets-années. Chez eux, le risque CV ne diminue qu’après plus de 20 à 25 ans d’arrêt.
Cette conclusion a des implications importantes pour les lignes directrices en matière de prévention en Algérie, où les habitudes tabagiques diffèrent légèrement mais où les “gros” fumeurs sont également nombreux.
Les implications pour l’Algérie
- Adopter une approche précoce de prévention :
La précocité du sevrage tabagique est essentielle pour limiter l’exposition cumulée au tabac. Les campagnes de sensibilisation doivent cibler particulièrement les jeunes fumeurs, en insistant sur les bénéfices de l’arrêt du tabac avant d’atteindre un seuil de 8 paquets-années. - Revoir les outils d’évaluation du risque CV :
Les outils de prédiction du risque CV utilisés en Algérie, comme le SCORE, pourraient être ajustés pour refléter les résultats de cette étude. Ils devraient considérer les ex-fumeurs avec une exposition tabagique élevée comme à risque prolongé, nécessitant une prise en charge soutenue. - Renforcer les programmes d’aide au sevrage :
Les structures de santé publique doivent intégrer des services spécialisés pour accompagner les fumeurs dans leur démarche de sevrage. Cela inclut des consultations spécialisées, un suivi médical régulier et des traitements adaptés. - Inclure les femmes dans les études locales :
En Algérie, le tabagisme féminin est souvent sous-estimé. Les futures recherches devraient inclure des cohortes plus représentatives pour mieux comprendre les impacts spécifiques chez les femmes, qui représentent une minorité parmi les fumeurs.
Qu’en retenir ?
Cette étude met en lumière l’importance d’une action précoce contre le tabagisme en Algérie. Si les bénéfices de l’arrêt sont évidents à tout âge, ils sont d’autant plus significatifs lorsqu’ils interviennent avant une forte accumulation de dommages. Elle souligne également la nécessité d’adapter les politiques de prévention et les recommandations médicales au contexte algérien, pour mieux protéger la population contre les maladies cardiovasculaires liées au tabac.
Vers un avenir sans tabac
L’Algérie a un rôle crucial à jouer dans la lutte contre le tabagisme. Par une meilleure sensibilisation, un accès renforcé aux soins et une actualisation des outils de prévention, il est possible de réduire l’impact de ce fléau sur la santé publique. Cette étude internationale fournit des bases solides pour repenser et renforcer les stratégies locales.
Encadré : Quelques chiffres sur le tabagisme en Algérie
- Prévalence chez les hommes : 32,2 % (selon une enquête nationale de 2017, pour la tranche d’âge 18-69 ans).
- Fumeuses actives : 0,4 % (selon la même enquête, bien que la tendance montre une augmentation chez les jeunes femmes).
- Coût annuel du tabac pour le système de santé : plus de 272 milliards de dinars (en prenant en compte les coûts directs et indirects liés au traitement de maladies provoquées par le tabagisme, notamment le cancer du poumon).
Un changement s’impose, et il commence aujourd’hui.
Mots Clés : Tabac, Cardiovasculaire, fumer