Les pompiers sont quotidiennement confrontés à des environnements toxiques. En plus des risques physiques liés aux incendies et aux interventions d’urgence, ils sont exposés à des substances chimiques nocives présentes dans la fumée, les retardateurs de flamme et certains équipements de protection. Une étude récente, publiée dans la revue scientifique ‘’Cancer’’, révèle un lien inquiétant entre cette exposition et l’apparition de gliomes, des tumeurs cérébrales dont le pronostic peut être grave.
Une profession exposée à de nombreux dangers
Gliomes : des tumeurs aux conséquences variables.
Les gliomes sont des tumeurs affectant le cerveau et la moelle épinière. Leur gravité varie en fonction du type et de la localisation. Certains, comme l’astrocytome pilocytique, ont un bon pronostic et répondent bien aux traitements. D’autres, comme le gliome infiltrant du tronc cérébral, sont beaucoup plus agressifs et difficiles à soigner. L’étude menée par des chercheurs de l’université ‘’Yale’’ montre que certaines mutations génétiques, impliquées dans le développement des gliomes, sont plus fréquentes chez les pompiers que chez d’autres travailleurs.
L’astrocytome pilocytique est un gliome rare et de faible grade du système nerveux central, souvent kystique et bien délimité. Ses symptômes varient selon sa localisation et peuvent inclure céphalées, troubles visuels, ataxie et nystagmus. Principalement présent dans le cervelet, il peut aussi affecter l’hypothalamus, le tronc cérébral, le chiasma optique et les hémisphères cérébraux.
Une mutation génétique plus fréquente chez les pompiers.

L’équipe de recherche a analysé les tumeurs cérébrales de 35 patients atteints de gliomes, dont 17 pompiers. Résultat : ces derniers présentaient davantage de mutations spécifiques liées à l’exposition à des produits chimiques toxiques. « Comme les pompiers sont confrontés à ces agents dangereux dans l’exercice de leur métier, nous avons examiné les signatures mutationnelles dans leurs tumeurs cérébrales », explique la professeure Elizabeth B. Claus, neurochirurgienne et chercheuse à l’université Yale.
Les gliomes, tumeurs cérébrales malignes les plus fréquentes chez l’adulte, se développent à partir des cellules gliales et peuvent altérer les fonctions motrices, cognitives et la personnalité du patient. Contrairement aux tumeurs cérébrales secondaires issues de métastases, ils sont primaires et peuvent toucher tous les âges. Une détection et une prise en charge précoces sont essentielles pour améliorer le pronostic.
Les haloalcanes en cause
L’étude met particulièrement en cause les haloalcanes, des composés chimiques présents dans de nombreux produits utilisés par les pompiers. Ces substances sont couramment utilisées dans les retardateurs de flamme, les extincteurs et d’autres équipements de lutte contre les incendies. Elles sont connues pour leur impact sur l’ADN et leur potentiel cancérigène. Les résultats montrent que la signature mutationnelle associée aux haloalcanes est plus marquée chez les pompiers, en particulier ceux exerçant depuis de nombreuses années.
Les haloalcanes et les haloarènes sont des hydrocarbures dans lesquels un ou plusieurs atomes d’hydrogène sont remplacés par des halogènes. Leur différence principale réside dans leur structure : les haloalcanes proviennent des alcanes, qui ont une chaîne ouverte, tandis que les haloarènes dérivent des hydrocarbures aromatiques.
D’autres professions, comme les peintres automobiles, sont également concernées par ces mutations. Cela suggère que l’exposition prolongée à ces produits pourrait être un facteur de risque majeur, nécessitant des mesures préventives adaptées.
Un appel à la prévention et à la reconnaissance des risques.
Si ces conclusions doivent être approfondies par de nouvelles recherches, elles mettent en lumière la nécessité d’identifier et de limiter l’exposition des travailleurs à ces agents toxiques. « Il est essentiel de mieux comprendre ces mécanismes pour ajuster les stratégies de santé publique et prévenir les risques évitables », souligne le Dr Claus.
Une reconnaissance encore insuffisante.
Dans plusieurs pays, les cancers liés aux expositions professionnelles des pompiers sont déjà reconnus, facilitant ainsi leur prise en charge. Une reconnaissance systématique de ces pathologies permettrait non seulement de simplifier ces procédures, mais aussi de renforcer la prévention et le suivi médical des pompiers tout au long de leur carrière.
Vers des solutions adaptées.
Face à ces résultats préoccupants, plusieurs mesures pourraient être mises en place :
- Renforcement des équipements de protection : améliorer les tenues et les masques pour limiter l’inhalation de substances toxiques.
- Surveillance médicale accrue : mettre en place un suivi régulier des pompiers pour détecter précocement d’éventuelles anomalies.
- Formation et sensibilisation : informer les pompiers sur les risques liés aux produits chimiques et les encourager à adopter des pratiques sécurisées.
- Interdiction ou restriction de certaines substances : rechercher des alternatives plus sûres aux produits actuellement utilisés dans la lutte contre les incendies.
Ces efforts sont essentiels pour protéger la santé des pompiers et leur garantir des conditions de travail plus sûres. En attendant, la recherche doit se poursuivre pour mieux comprendre les liens entre l’exposition professionnelle et le développement des cancers, et ainsi proposer des solutions adaptées à cette profession indispensable à la sécurité publique.
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