
Une vaste étude menée par l’université de Princeton suggère que l’asexualité pourrait être liée, au moins en partie, à des facteurs génétiques. Une découverte qui bouscule les approches psychologiques et sociétales habituellement avancées pour expliquer ce phénomène encore mal compris.
Un phénomène marginal mais réel
L’asexualité, définie comme l’absence d’attirance sexuelle pour autrui, concernerait environ 1 % de la population mondiale. Souvent mal perçue ou confondue avec le célibat, elle est désormais étudiée comme une orientation sexuelle à part entière.
Jusqu’ici, les travaux scientifiques avaient surtout mis en avant des causes psychologiques (traumatismes, anxiété, éducation stricte) ou sociétales (pression sociale, environnement culturel). L’étude américaine apporte un nouvel éclairage : le génome lui-même pourrait jouer un rôle déterminant.
Une enquête inédite par son ampleur
Les chercheurs de Princeton ont analysé les données de près de 400 000 Britanniques âgés de 39 à 73 ans, et de 13 500 Australiens de 18 à 89 ans. Contrairement aux études précédentes, l’échantillon couvrait un large spectre d’âges et de profils, permettant une vision plus nuancée.
Résultat : environ 1 % des participants se sont déclarés asexuels, n’ayant jamais eu d’expérience sexuelle. À partir de là, les chercheurs ont identifié un profil type.
Un profil socio-psychologique marqué
Selon les conclusions de l’étude, les personnes asexuelles seraient en moyenne :
- plus instruites,
- moins consommatrices d’alcool et de tabac,
- plus sujettes à la nervosité,
- plus souvent seules et insatisfaites de leur vie.
Chez les hommes, un autre facteur ressort : la géographie. L’asexualité est plus fréquente dans des régions où la population féminine est moins nombreuse et où les inégalités sociales et économiques sont plus fortes.
Une signature génétique sur le chromosome 1
Le point le plus novateur de l’étude réside dans la découverte d’un locus significatif sur le chromosome 1. Cette zone du génome abrite des mutations communes (appelées SNP) que les chercheurs ont retrouvées plus souvent chez les individus asexuels.
Autrement dit, il existerait un marqueur génétique associé à l’asexualité.
Bien que ce lien demande encore à être confirmé, il ouvre des pistes inédites pour comprendre comment la biologie influence nos comportements intimes.
Quelles implications médicales et sociales ?
L’étude souligne que l’absence de relations sexuelles peut avoir des répercussions sur la santé :
- un risque accru de solitude,
- une plus grande vulnérabilité psychologique,
- parfois des désavantages économiques, notamment en matière fiscale ou sociale.
Mais il ne s’agit pas d’une pathologie. Les chercheurs insistent : l’asexualité est une orientation sexuelle et non une maladie à « soigner ». L’enjeu est plutôt de mieux accompagner ces personnes, souvent confrontées à l’incompréhension ou à la stigmatisation.
Un débat évolutionniste
D’un point de vue scientifique, cette découverte soulève aussi une question fascinante :
Pourquoi la nature aurait-elle « prévu » un profil génétique rendant une partie de la population asexuelle ?
Certains chercheurs avancent que cela pourrait représenter un mécanisme évolutif de régulation démographique ou une forme d’adaptation sociale encore méconnue.
Recommandations médicales et sociétales
Pour les professionnels de santé :
- Éviter la pathologisation de l’asexualité ;
- Favoriser une écoute active et bienveillante lors des consultations ;
- Orienter vers un soutien psychologique en cas de détresse liée à l’isolement ;
- Mener davantage d’études cliniques pour distinguer l’asexualité d’autres troubles (comme la baisse de libido liée à des maladies ou traitements).
Pour la société :
- Promouvoir une meilleure information afin de réduire les tabous ;
- Intégrer l’asexualité dans les programmes d’éducation sexuelle ;
- Lutter contre les discriminations et respecter la diversité des orientations.
Un nouveau regard sur l’intimité humaine
Cette étude marque un tournant. Elle rappelle que la sexualité – ou l’absence de sexualité – n’est pas seulement une affaire de choix ou de culture, mais aussi de biologie et de génétique.
Au-delà des chiffres et des gènes, le message essentiel demeure : il s’agit de reconnaître et respecter toutes les formes de vie intime, sans jugement, mais avec compréhension et solidarité.
Mots clés : Asexualité ; génétique ; santé ; intimité ; médicale ; sociale ;