Plus de trente ans après la disparition de la poliomyélite sauvage du territoire allemand, une forme du poliovirus sauvage de type 1 (WPV1) a été détectée dans des échantillons d’eaux usées. L’Institut Robert-Koch (RKI), principal organisme de santé publique allemand, l’a confirmé mercredi auprès de Reuters. Une découverte inattendue, qui rappelle que le virus n’est toujours pas totalement éradiqué dans le monde.

Une première détection environnementale depuis le début des surveillances

Le RKI explique que le poliovirus sauvage a été retrouvé dans un seul échantillon lors d’un programme de surveillance systématique des eaux usées, lancé en 2021. Aucun cas humain n’a été signalé à ce jour.

• Dernier cas autochtone en Allemagne : 1990
• Derniers cas importés : 1992, en provenance d’Égypte et d’Inde

Cette détection constitue donc un événement rare, mais pas nécessairement alarmant selon les autorités sanitaires.

Risque faible pour la population : pourquoi ?

L’Institut Robert-Koch évalue le risque de contamination comme « très faible ». Deux raisons principales

1. Une couverture vaccinale élevée

• La population allemande bénéficie d’une vaccination massive contre la poliomyélite, via le vaccin inactivé (IPV).
• Ce vaccin, administré dès le plus jeune âge, protège efficacement contre les formes paralysantes.

2. Un cas isolé en environnement

• La détection concerne un prélèvement ponctuel, ce qui suggère une introduction limitée, probablement par une personne infectée à l’étranger, sans circulation étendue du virus.

Comprendre : deux formes de poliovirus circulent dans le monde

Il existe aujourd’hui deux grands types de poliovirus susceptibles d’être retrouvés dans l’environnement ou chez l’homme.

1. Le poliovirus sauvage (WPV)

• Encore présent uniquement au Pakistan et en Afghanistan
• Extrêmement rare grâce aux campagnes mondiales d’éradication
• Responsable des formes les plus graves de la maladie (paralysies irréversibles)

La détection en Allemagne concerne précisément cette forme, ce qui rend l’observation notable.

2. Le poliovirus dérivé d’un vaccin (VDPV)

Il provient de mutations très rares du virus atténué utilisé dans le vaccin oral (OPV), autrefois administré dans de nombreux pays.

• Ce virus atténué peut, dans des conditions particulières (faible vaccination, persistance dans l’environnement), retrouver un pouvoir infectieux.
• Ces formes dérivées circulent aujourd’hui dans plusieurs pays.

L’Allemagne avait déjà détecté ce type dans certains échantillons d’eaux usées depuis fin 2024.

Comment les eaux usées permettent de traquer la polio ?

La surveillance environnementale est un outil clé dans la lutte mondiale contre la poliomyélite.

• Le virus est excrété dans les selles des personnes infectées, même asymptomatiques.
• Les réseaux d’eaux usées permettent de détecter très tôt une circulation virale.
• Cette méthode révèle souvent la présence du virus avant l’apparition de cas cliniques.

Cette approche est désormais utilisée par l’OMS, l’Union européenne et plusieurs pays pour anticiper tout risque de résurgence.

Poliomyélite : une maladie toujours dangereuse

Le poliovirus peut provoquer :

• des paralysies irréversibles,
• une atteinte respiratoire grave,
• voire la mort dans 5 à 10 % des formes paralysantes.

Aucun traitement curatif n’existe : la prévention repose exclusivement sur la vaccination.

Grâce aux campagnes internationales massives, le nombre de cas a été réduit de 99 % depuis 1988. Mais le virus continue d’apparaître ponctuellement dans :

• des zones de conflit,
• des régions où la vaccination est insuffisante,
• ou via des introductions dans les eaux usées, comme récemment en Palestine, au Royaume-Uni, aux États-Unis et en Allemagne.

Une alerte maîtrisée mais un rappel important

La détection du poliovirus sauvage en Allemagne n’annonce pas une reprise de l’épidémie, mais constitue un signal de vigilance.

Elle confirme que :

• l’éradication totale n’est pas encore atteinte,
• la vaccination reste indispensable,
• et la surveillance environnementale est un outil majeur pour anticiper tout risque de réintroduction.

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