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Ramadan et sevrage tabagique : Une opportunité pour se libérer progressivement du tabagisme.

Edité par : Chabane Bouarissa | journaliste
21 mars 2024

Le Ramadan est synonyme de résolutions telles que ‘’suivre un régime’’, ‘’être ponctuel’’, ‘’approfondir la connaissance du Coran’’, et surtout ‘’arrêter de fumer’’. Cette dernière résolution est très fréquente parmi les fumeurs pendant ce mois sacré. Outre son aspect spirituel d’aide à surmonter les addictions, le Ramadan offre un environnement propice pour arrêter naturellement de fumer et se libérer de la dépendance au tabac.

Conscients des risques que cette habitude représente pour leur santé, de nombreux fumeurs saisissent l’occasion du mois de Ramadan pour échapper à l’emprise de la cigarette. Pour les professionnels de la santé, ce mois d’abstinence offre une opportunité idéale pour initier une démarche de sevrage tabagique.

Il s’agit d’un mois différent des autres. Et naturellement, les gens deviennent plus enclins à abandonner toute source de plaisir et de satisfaction. Pendant ramadan, les conditions sont favorables pour s’autoriser à penser que ce qui ne pouvait être possible pendant longtemps, peut l’être pendant ce mois sacré.

En effet, de nombreuses personnes, même de grands fumeurs, observent le jeûne pendant le mois de Ramadan et parviennent à s’abstenir de fumer jusqu’au coucher du soleil. Ils ne peuvent donc pas fumer autant de cigarettes qu’à leur habitude pendant les 7 ou 8 heures de nuit. Cela représente ainsi une véritable forme de sevrage !

« Durant le mois de Ramadan, le processus de sevrage tabagique est considérablement facilité par rapport aux autres périodes de l’année. Le jeûne oblige les fumeurs à passer environ 15 heures sans tabac, ce qui rend l’arrêt plus accessible. Cependant, bien que ce mois sacré soit propice pour se libérer de la dépendance à la cigarette, la décision d’arrêter de fumer doit déjà être ancrée dans l’esprit de l’individu et être le fruit d’une réflexion approfondie», tient à dire Dr Souad Brahimi.

« Il serait bénéfique de les encourager à maintenir ce rythme les jours suivant la fin du Ramadan et, éventuellement, à envisager un arrêt progressif du tabac, puisqu’ils ont réussi à réduire considérablement leur consommation de nicotine », ajoute-t-elle


Afin d’optimiser les chances de réussite, la spécialiste nous rappelle quelques notions médicales à comprendre et à appliquer.

Véritable problème de santé publique, le tabagisme est reconnu par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) comme étant l’une des principales causes de décès et de maladies. On différencie 2 types de tabagisme:

  • Le tabagisme actif qui est le fait de fumer, que ce soit cigarette ou autre
  • Le tabagisme passif qui est le fait de respirer de manière involontaire la fumée dégagée par un ou plusieurs fumeurs actifs. Les enfants de parents fumeurs sont particulièrement exposés au tabagisme passif au quotidien. Les fœtus peuvent eux aussi subir le tabagisme passif pendant la grossesse.

Fumer régulièrement provoque chez tout fumeur une double dépendance :

1. La dépendance psychologique : Pour de nombreuses personnes, fumer représente un véritable plaisir associé aux moments agréables de la vie. Pour d’autres, la cigarette est une aide pour surmonter les difficultés professionnelles ou familiales du quotidien. Il y a aussi ceux pour qui fumer est devenu un automatisme, allumant une cigarette après l’autre de manière machinale, parfois sans même les fumer complètement.

Si l’on ignore cet aspect psychologique, les tentatives de sevrage risquent de rencontrer des échecs significatifs.

2. La dépendance physique : La nicotine présente dans la fumée de tabac est la substance chimique responsable de cette dépendance. Lorsque le tabac est arrêté brusquement, des effets indésirables surviennent : irritabilité, nervosité, anxiété, insomnie, difficultés de concentration, perte de mémoire, maux de tête, sensation de faim, et bien d’autres encore.

Le fumeur se retrouve alors confronté à une pulsion irrésistible qui le pousse à reprendre une cigarette, même s’il va à l’encontre de sa propre volonté. Fumer devient alors essentiel pour éviter ces sensations désagréables.

Pour tout fumeur en quête d’arrêt, chaque heure écoulée sans cigarette représente une petite victoire personnelle. Et les jeûneurs réussissent, année après année, à relever ce défi… Mais comment font-ils exactement ?

  • Les jeûneurs parviennent à dompter leur dépendance psychologique à la cigarette, leur détermination à accomplir leur journée de jeûne prenant le pas sur leur désir de fumer. En état de jeûne, ils écartent naturellement les occasions de fumer, déclinent poliment les offres de cigarettes en invoquant simplement leur jeûne, et trouvent d’autres occupations pour occuper leur esprit.

Chaque envie à laquelle on fait face nous renforce pour préparer une abstinence durable dont des millions d’anciens fumeurs se réjouissent définitivement.

Pour un fumeur qui essaye d’arrêter, chaque heure d’abstinence passée est une petite victoire sur lui et le rend plus fort et fier. Les trois premières semaines sont celles où les envies sont les plus fréquentes, ensuite cela devient occasionnel puis rare : faire face une cinquantaine de fois consécutives est généralement suffisant pour s’immuniser contre la rechute. À la fin du ramadan, le sevrage est terminé et une nouvelle vie de non fumeur commence !

Contrairement à une croyance commune, les envies de fumer ne croissent pas avec le temps.

  • Ils font face à leur dépendance physique sans recourir à un traitement de substitution, comptant uniquement sur leur volonté, renforcée par la sacralité du mois de Ramadan. Leur niveau d’irritabilité varie selon le degré de leur dépendance.
  • Une fois la nuit tombée, ils ne consomment pas autant de cigarettes que d’habitude en dehors du mois de Ramadan, car la soirée est courte entre le moment de la rupture du jeûne et l’heure du coucher. Ainsi, celui qui fumait un paquet par jour ne parviendra probablement pas à en consommer la moitié en seulement quelques heures.

Malgré les nombreuses “petites victoires” remportées sur eux-mêmes pendant 30 jours consécutifs, une fois le Ramadan terminé, de nombreux  fumeurs retournent à leur consommation habituelle de cigarettes. Pourtant, cette période pourrait être une opportunité de maintenir cet effort pour en finir définitivement avec la cigarette, étant si proches du but.

« Pour arrêter définitivement, il ne faut pas fumer plus de cigarettes que pendant le mois de Ramadan, puis il faut diminuer ce nombre semaine après semaine, par paliers », conseille Dr Brahimi.

Le jeûne du mois de Ramadan réunit les conditions idéales à un sevrage tabagique progressif et réussi. Pour motiver les candidats à cette résolution, rappelons quelques avantages de l’arrêt du tabac :

  • se libérer d’une dépendance ;
  • retrouver sa forme physique et sa vitalité ;
  • retrouver le goût des aliments et le plaisir des sensations olfactives ;
  • diminuer la fréquence des rhumes et des infections broncho-pulmonaires, pour soi et l’entourage, en particulier les enfants exposés au tabagisme passif ;
  • vivre en meilleure santé : après 2 ans de sevrage, le risque d’infarctus du myocarde (« crise cardiaque ») est redevenu celui d’un non-fumeur, idem après 15 ans pour le risque de cancer du poumon.

Les médicaments de substitution visent principalement à combattre la dépendance physique à la nicotine. Initialement, ils fournissent au patient des quantités de nicotine équivalentes à celles généralement consommées pour prévenir les symptômes de sevrage. Ensuite, en réduisant graduellement les doses, ces médicaments permettent à l’organisme de se débarrasser progressivement de cette dépendance.

Les thérapies cognitivo-comportementales TCC concernent la dépendance psychologique. Les spécialistes du sevrage tabagique recommandent parfois cette méthode. Ces approches sont des techniques qui ont été démontrées pour doubler le taux d’abstinence à 6 mois. Son principe est  d’anticiper les diverses situations à risques susceptibles d’entraîner une pulsion à fumer : soirées entre amis, situations de conflit professionnel ou familial, parfois certaines pensées, puis développer des stratégies de gestion de ces situations telles que :

  • apprendre à quitter momentanément la situation ;
  • apprendre à la substituer par un autre comportement (marche, relaxation, gomme à mâcher, occupez vos doigts…) ;
  • identifier les pensées négatives, lutter contre ces pensées et les remplacer par des pensées plus positives (comme se rappeler pourquoi il est important de s’arrêter de fumer, se rappeler que la pulsion à fumer est courte et va bientôt cesser).

80% des personnes qui prennent l’initiative d’arrêter leur consommation tabagique, recommencent à fumer dans le premier mois qui suit le sevrage. Pour réussir ce processus et afin d’éviter une rechute les jours suivant la fin du Ramadan, Dr Brahimi souligne qu’il est préférable d’être accompagné par des professionnels de la santé. «Des études ont prouvé que le taux de réussite du sevrage tabagique pour les personnes non accompagnées oscille entre 5 et 7% alors que pour les personnes accompagnées, ce taux varie entre 20 et 30%».

Encourageant les fumeurs à franchir le cap, Dr Brahimi souligne que l’arrêt du tabac entraîne des effets immédiats sur le corps. «20 minutes après, la fréquence cardiaque et la pression sanguine retombent. Après 12 heures, le taux de monoxyde de carbone dans le sang redevient normal. Entre la 2ème et la 12ème semaine, la circulation sanguine s’améliore et la fonction pulmonaire augmente. Entre le 1er et le 9ème mois, la toux et l’essoufflement diminuent».

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