Les feux ravageurs qu’ont connus plusieurs wilayas du littoral Algérien n’ont pas fait que des dégâts matériels et environnementaux. Comme toutes les populations touchées par des événements météorologiques extrêmes, de nombreuses familles souffrent d’un stress et angoisse intenses qui peuvent nécessiter un appui psychologique, administrable par tous.
« J’avais tellement peur, je voulais vraiment rentrer chez moi, mes grands-parents, mes amis me manquaient tellement », dira Safa, une jeune fille de 15 ans, s’est retrouvée bloquée plusieurs heures avec ses parents près de Touja, dans la wilaya de Bejaia. Son père a dû conduire plusieurs heures d’affilée avant de mettre sa famille en sécurité, chez des proches.
Le cas de Safa est loin d’être isolé. À la suite des feux de forêt, beaucoup d’habitants sont en état de choc ou subissent un stress intense et de fortes émotions.
Dans la majorité des cas, l’aide psychologique aux victimes de catastrophes climatiques peut être administrée par leurs proches. Même si l’on n’est pas un spécialiste de la santé mentale, on peut faire quelque chose, soulignent les spécialistes.
La détresse psychologique résulte d’un ensemble d’émotions négatives qui, lorsqu’elles sont vécues avec persistance chez un individu, peuvent entraîner des conséquences de santé importantes telles que la dépression, l’anxiété ou une incapacité́ à s’adapter, efficacement aux circonstances…
‘’Ma Santé, Ma Vie’’ détaille les étapes de prise en charge des personnes sinistrées par le biais de premiers secours psychologiques (PSP), une approche recommandée par l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) et plusieurs autres chercheurs.
Sid Ali, un psychologue rencontré sur le terrain auprès des sinistrés des feux de forêt de Bejaia nous explique que les gens sont dans une phase où ils vivent les événements avec de grandes émotions de détresse, de stress…, sans qu’ils soient préparés à ce qui se vit actuellement. « Ils peuvent aussi ressentir de la colère et de l’indignation », ajoute-t-il.
Selon le psy, ce stress est une réponse normale de l’organisme face à l’inconnu, ou face à une crainte pour sa vie ou pour sa situation financière. « Il y a des gens qui peuvent se retrouver en détresse psychologique. Ces gens-là, il est important de les identifier et de les soutenir à très court terme ».
En quoi consistent les PSP ?
On décrit les premiers secours psychologiques (PSP) comme étant une aide à la fois humaine et soutenante apportée à une personne qui souffre et qui peut avoir besoin de soutien.
Apporter des PSP de manière responsable, cela veut dire :
- Respecter la sécurité, la dignité et les droits ;
- Adapter ce que l’on fait pour prendre en compte la culture de la personne ;
- Savoir quelles sont les autres mesures d’intervention d’urgence ;
- Prendre soin de soi.
La plupart des gens n’ont pas besoin d’intervention spécialisée en santé mentale, ils vont trouver du soutien en parlant à leurs proches.
Pourquoi offrir les PSP en cas de désastre ?
Les études puliées et l’avis des experts conviennent que:
- Les PSP amènent une satisfaction pour les personnes qui ont offert les PSP et celles qui en ont bénéficié ;
- Les PSP permettent de répondre à des besoins psychologiques, émotionnels et sociaux immédiats des bénéficiaires et les aider à y répondre au moyen d’outils concrets pour les aider à mieux gérer la situation ;
- Aider les personnes à obtenir informations, du soutien social et des services ;
- Les réconfortent les personnes et les aider à se calmer ;
- Des études supplémentaires sont nécessaires pour démontrer l’efficacité des PSP à prévenir et réduire les impacts sur la santé mentale à plus long terme ;
- Les PSP ne causent pas de tort aux bénéficiaires et qu’ils sont préférables à d’autres approches (ex.: débriefing psychologique).
Débriefing psychologique
- «Amener la personne à s’exprimer et raconter brièvement les perceptions, les pensées et les réactions émotionnelles qu’elle a eu au cours d’un événement stressant récent. » (OMS, 2010 & Sphère, 2011).
- n’est pas recommandé par les études et les experts.
- diffère du débriefing opérationnel que les intervenants de certaines organisations utilisent à la fin d’une mission ou d’une tâche.
Les principes d’action des PSP :
Cet outil, les premiers secours psychologiques, se compose de trois étapes : observer pour identifier les personnes qui sont en situation de détresse, les écouter et accepter leurs propos sans juger, et enfin les orienter vers leurs propres ressources, leurs appuis psychologiques habituels.
OBSERVER
- Assurez-vous de la sécurité : Question à vous poser: Puis-je me trouver ici sans me mettre en danger ou en faire courir à d’autres personnes ?
- Identifiez les personnes ayant clairement des besoins essentiels urgents :
- Personnes gravement blessées ou ayant besoin d’une aide médicale d’urgence ;
- Danger immédiat (besoin d’être secourues) ;
- Besoin de protection (violence, contre intempéries) ;
- Des personnes qui peuvent se faire du mal ou faire du mal à autrui.
- Identifiez les personnes en profonde détresse : qui présentent les signes à type de Pleurs, tristesse, humeur dépressive, anxiété, peurs, hyper-vigilance avec Inquiétudes. Aussi bien des troubles du sommeil avec insomnie, cauchemars avec parfois une sensation d’être coupé de la réalité, ave une torpeur et une désorientation voire même une incapacité de s’occuper de soi ou de ses proches.
- Identifiez les personnes qui besoin d’une assistance médicale : Ayez conscience de vos limites et demandez de l’aide à d’autres personnes capables de fournir une assistance médicale ou autre, pour Certaines personnes qui ont besoin de plus que de simples PSP.
ECOUTER
- Abordez les personnes qui peuvent avoir besoin de soutien : avec respect en se présentant en premier et leur demander s’il y a possibilité d’aider. Or, il faut Trouver un endroit sûr et calme pour parler en assurant la sécurité en les protégeant des médias.
- leurs besoins et leurs préoccupations : Même si certains besoins apparaissent évidents, il faut demander de nommer les besoins et les préoccupations actuelles les plus importants.
- Écoutez les personnes, et aidez-les à se calmer : Acceptez ce que décrit la personne, reconnaissez les pertes « Je suis désolée. Je comprends
- que vous soyez triste». Si elle montre des signes d’une détresse importante, aidez-la à retrouver son calme et veillez à ce qu’elle ne reste pas seule.
METTRE EN CONTACT
- Aidez les personnes à répondre à leurs besoins essentiels et à accéder aux services : Abri, nourriture, eau, accès toilettes, services de santé,
- Aidez les personnes à gérer les problèmes qu’elles rencontrent : en identifiant les ressources et les soutiens qu’elle possède pour l’aider.
- Transmettez des informations : informations compréhensibles et exactes sur les proches et les services disponibles et sur les raisons des mesures qui sont prises.
- Mettez les personnes en contact avec leurs proches et avec un soutien social.
Ethique
Voici une liste de conseils sur ce qui est ‘’à faire et à ne pas faire sur le plan éthique’’ : elle sert à éviter de nuire à la personne, à lui fournir les meilleurs soins possibles et à agir seulement dans son intérêt.
Proposez votre aide de la manière la plus appropriée et la plus réconfortante pour ceux qui la reçoivent. Pensez à ce que signifient ces conseils sur le plan éthique, dans votre contexte culturel.
A faire
- Respecter le droit de la personne de prendre ses propres décisions.
- Connaître et mettre de côté vos préjugés et parti pris. » Bien expliquer à la personne que, même si elle refuse d’être aidée, elle pourra toujours avoir accès à cette aide plus tard.
- Respecter la vie privée de la personne et s’assurer de la confidentialité de son histoire, si cela est approprié.
- Adopter une attitude appropriée en tenant compte de la culture, de l’âge et du sexe de chacun.
A ne pas faire
- Ne pas exploiter votre relation en tant qu’aidant.
- Ne jamais demander de l’argent ou un service en échange de l’aide que vous apportez.
- Ne jamais faire de fausses promesses ou donner de fausses informations.
- Ne pas exagérer vos compétences.
- Ne pas imposer votre aide, ne pas insister ou vous imposer.
- Ne pas obliger quelqu’un à vous raconter son histoire.
- Ne pas divulguer l’histoire des personnes que vous aidez.
- Ne pas juger quelqu’un sur ses actes ou ses sentiments.
En somme, les premiers secours psychologiques ne visent pas à offrir un soutien psychologique professionnel ou à pousser les personnes à parler de leurs émotions ou leurs réactions face à l’événement.
C.B