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Post-partum : pourquoi « dormir quand bébé dort » est un mythe inefficace, selon la science

Edité par : Dr. Wioletta Julia Puzio | Docteur en médecine
29 août 2025

Un mantra souvent répété… mais mal adapté à la réalité

C’est une phrase que presque toutes les nouvelles mères entendent dès les premiers jours : “Essaie de dormir quand ton bébé dort.” Une injonction bienveillante, dite avec empathie, mais qui se heurte bien souvent à la dure réalité du post-partum. Entre les pleurs, l’allaitement, les soins, les montées d’angoisse et la pression de “bien faire”, trouver du repos est un défi. Et selon une récente étude publiée dans la revue Sleep, ce conseil serait non seulement inefficace, mais aussi inadapté face aux vrais besoins physiologiques et psychiques des jeunes mères.

Pour comprendre l’impact réel de la maternité sur le sommeil, des chercheurs ont suivi 41 femmes âgées de 26 à 43 ans, devenues mères pour la première fois. Grâce à des capteurs portés au poignet, leur sommeil a été enregistré avant et après l’accouchement. Sans surprise, le temps total de sommeil a chuté : on passe en moyenne de 7,8 heures par nuit à seulement 4,4 heures dans les premiers jours suivant la naissance.

Mais ce qui frappe surtout, c’est la fragmentation du sommeil. Avant la naissance, les femmes dormaient en moyenne 5,6 heures d’affilée. Après, elles ne dorment plus que par tranches de 2,2 heures. Un tiers d’entre elles ont même connu plus de 24 heures sans dormir d’un seul bloc.

 « C’est la perte de sommeil ininterrompu qui nous a le plus alertés », explique Teressa Lillis, chercheuse principale de l’étude. « Ce n’est pas juste qu’elles dorment moins, c’est qu’elles ne peuvent plus atteindre les phases profondes du sommeil réparateur. »

Beaucoup de parents s’imaginent pouvoir “récupérer” en dormant par petites tranches, comme le fait le nourrisson. Mais les cycles de sommeil du bébé et ceux de l’adulte sont très différents. Un nouveau-né dort en moyenne entre 14 et 17 heures par jour… mais jamais plus d’une ou deux heures d’affilée. Ce rythme morcelé ne permet pas à la mère d’atteindre un sommeil profond ou paradoxal, pourtant essentiels à la récupération physique et mentale.

Même en suivant le conseil de dormir “quand bébé dort”, les mères restent donc dans un état d’épuisement chronique. L’étude montre qu’entre la 2e et la 7e semaine post-partum, elles dorment au maximum 3,2 heures sans interruption. Et à peine 4,1 heures entre la 8e et la 13e semaine. Ce déficit de sommeil profond augmente le risque de troubles anxieux, de perte de concentration, et surtout de dépression post-partum.

Le manque de sommeil est l’un des premiers facteurs de détresse psychologique dans la période post-natale. Il agit comme un amplificateur du stress, de l’irritabilité, des pensées noires. Pourtant, cette fatigue reste souvent banalisée. Parce qu’elle “fait partie du rôle de mère”, elle est rarement prise au sérieux.

Mais priver une femme de repos de manière prolongée n’est pas anodin. Cela affecte son système immunitaire, son équilibre hormonal, sa capacité à s’adapter émotionnellement. C’est une forme d’épuisement qui peut laisser des traces durables, bien au-delà des premières semaines.

Dormir en même temps que bébé ? Cela peut parfois aider… mais ce n’est pas la solution. Ce que montre clairement cette étude, c’est que les mères ont besoin de plages de sommeil prolongé, au moins 4 à 5 heures d’affilée, pour espérer récupérer. Et pour y parvenir, elles doivent être entourées et soulagées dans les autres tâches du quotidien.

Cela implique un partage équitable des responsabilités parentales, mais aussi un changement de regard collectif. Aider une jeune mère, ce n’est pas seulement lui offrir des conseils : c’est lui permettre de se reposer vraiment. Préparer un repas, s’occuper du bébé quelques heures, faire les courses, répondre au téléphone à sa place : ces gestes simples peuvent être infiniment plus précieux qu’une phrase bien intentionnée.

Au fond, ce que révèle cette étude, c’est un écart entre la réalité biologique du post-partum et les attentes sociales qui pèsent sur les mères. On leur demande d’être disponibles, rayonnantes, organisées… alors même qu’elles dorment à peine.

Pour que les femmes traversent cette période sans s’épuiser, il faut mieux les informer, mieux les entourer, et mieux reconnaître leurs besoins fondamentaux – à commencer par le droit au sommeil. Un vrai sommeil. Pas quelques micro-siestes arrachées entre deux tétées.

Mots clés : sommeil ; dormir ; accouchement ; bébé ; maman ; santé ; Post-partum ;

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