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Le secteur de la santé se féminise davantage… Dr Rahima Sahki : «Là où je travail, plus de 80 % des médecins sont des femmes»

Edité par : Hafid Azzouzi | Journaliste et Consultant en communication
20 mars 2023

Spécialiste en médecine interne, option cardio-vasculaire, Dr Rahima Sahki exerce son métier depuis 10 ans.  Cette praticienne spécialiste principale au service de médecine interne d’un hôpital public à Alger, nous parle dans cet entretien de la place qu’occupe la femme dans le secteur de la santé. Elle estime que le secteur se féminise chaque année davantage. Elle évoque aussi, entre autres, les moments difficiles vécus aussi bien par les patients que par le personnel soignant durant la pandémie de la Covid-19.  Dr Sahki précise, en outre, que plusieurs soignantes ont été emportées par cette maudite maladie. Il y a aussi celles qui en gardent toujours les séquelles. La femme médecin a fait face, avec beaucoup de courage et d’abnégation, à toutes les situations provoquées par la pandemie, a-t-elle également déclaré. «Je tiens à souligner particulièrement le retentissement psychologique qui pesait sur nous, surtout durant la période de surcharge des hôpitaux, notamment lors de la vague Delta», a-t-elle confié dans cet entretien accordé au magazine «ma Santé, ma Vie», spécialisé dans le domaine de la santé et du bien-être.  

«ma Santé, ma Vie» : Comment voyez-vous la place qu’occupe, aujourdhui, la femme algerienne dans le secteur la santé ?

Dr Sahki : Actuellement, la femme occupe majoritairement et efficacement pratiquement toutes les spécialités aussi bien médicales que chirurgicales. Là où j’exerce, plus de 80% des médecins sont des femmes. Cela dit, le nombre de femmes dans le secteur de la santé est nettement prépondérant par rapport à celui des hommes. Donc, on peut dire que ce secteur se féminise chaque année davantage.

En votre qualité de médecin qui a beaucoup travaillé durant la pandémie de Covid-19, pouvez-vous nous dire comment les femmes soignantes ont fait face à cette situation difficile au sein des établissements de santé ?

Durant la période de coronavirus, notre service de médecine interne a été transformé en unité Covid-19. J’étais mobilisée, avec mes collègues, dont la majorité est constituée de femmes, comme je l’ai préalablement souligné. Nous avons pris en charge des patients hospitalisés à l’unité ainsi qu’aux urgences médicales de l’hôpital. La difficulté et la particularité de cette période résidait non seulement dans la prise en charge médicale, mais également dans la sensibilisation de la population. Un autre point important aussi qui nécessite d’être cité est la prise en charge de nos malades chroniques non contaminés, dont la majorité est sous traitement lourd. Il s’agit, entre autres, “des immunosuppresseurs” pour certains patients. Nous avons également eu recours à la téléconsultation et le suivi de loin pour éviter le risque d’exposition (initiative purement personnelle). D’autres difficultés auxquelles le personnel de santé a fait face est la continuité des gardes avec un manque d’effectifs. D’ailleurs, beaucoup de collègues sont tombés malades à la même période, chose qui a vraiment rendu pénible notre tâche en ces circonstances difficiles. Cela sans parler bien évidemment de la surexposition des équipes à l’épuisement physique, en raison de la grande charge de travail. Je tiens à souligner particulièrement le retentissement psychologique qui pesait sur nous, surtout durant la période de surcharge des hôpitaux, notamment lors de la vague Delta. Celle-ci, faut-il le préciser, a été la plus sévère. D’ailleurs, elle a même provoqué d’énormes perturbations dans la distribution d’oxygène, ce qui a suscité une grande pression et une tension sur les structures de santé. Pour moi, c’est la période la plus dure de la pandémie. Toutefois, devant ces moments de crise sanitaire, la mobilisation citoyenne a été des plus remarquables, tant la solidarité s’est manifestée de manière continue. Nous avons vu des bénévoles, des associations qui n’ont pas cessé d’aider les patients. Je cite, notamment, le collectif «Algerian medical network» dont je suis membre et les différents bienfaiteurs en Algérie et chez la diaspora qui ont fait don de matériel médical pour les services Covid-19 au niveau de plusieurs hôpitaux. Des gestes qui ont grandement contribué à la prise en charge des malades.

Maintenant, après le retour à la normale, quelles sont, selon vous, les séquelles physiques et psychologiques laissées par la pandémie du coronavirus ?

Après le retour à la normale et la reprise de nos activités habituelles au service de médecine interne, nous avons remarqué que beaucoup de malades ont gardé des séquelles physiques, principalement sur le plan respiratoire et cardiaque surtout. Je parle des patients qui ont développé des formes sévères. Pour les séquelles psychologiques, il y en a aussi. Il est même difficile de les surmonter. Une prise en charge psychologique est justement recommandée pour les personnes qui en souffrent toujours. Le personnel soignant n’a pas d’ailleurs connu de répit, même durant la phase post-Covid-19. Pour revenir à l’implication remarquable de la femme dans la lutte contre la propagation du virus, il est important de préciser que plusieurs soignantes ont été emportées par cette maudite maladie. Il y a aussi celles qui gardent les séquelles de la contamination. Cela étant, tout comme les hommes, la femme médecin a fait, avec beaucoup de courage et d’abnégation, face à toutes les situations provoquées par la pandémie.

H.Azzouzi